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Bananes, café et chocolat. 400 ans de commerce maritime
BANANES, CAFÉ ET CHOCOLAT
Du vaisseau de la Compagnie des Indes au cargo bananier, le transport maritime des denrées alimentaires avant la conteneurisation.
En corollaire de l’exposition temporaire « De l’amphore au conteneur, 2000 ans de commerce maritime » qui se tient au Musée national de la Marine du 15 octobre 2014 au 28 juin 2015 est présentée ici une sélection de modèles de navires, d’objets et de documents iconographiques propres à évoquer le transport maritime des denrées alimentaires avant la conteneurisation, sur une période allant du XVIIe siècle aux années 1960.
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, les voyages sur les nouvelles routes maritimes vers l’Asie (par le cap de Bonne -Espérance), les Antilles et l’Amérique découvertes à la Renaissance s’intensifient. Les classes aisées accèdent aux produits venus des colonies françaises des Antilles et de l’Océan Indien, le sucre, le café, le cacao, et aux épices d’Extrême-Orient : poivre, girofle, cannelle, muscade. A ceci s’ajoutent le café de la péninsule arabique et le thé de Chine. L’engouement suscité donne naissance aux Compagnies des Indes hollandaise et anglaise. La première Compagnie des Indes française est fondée un peu plus tard, à Lorient, en 1664, sous l’impulsion de Colbert. À bord des navires aménagés pour gagner un maximum de place en cale, les caisses et les sacs d’épices, de café, thé, sucre et fèves de cacao voisinent avec les ballots de toiles de coton et la porcelaine. Très attendues, les cargaisons obtenues au prix d’expéditions risquées atteignent des sommes colossales. Perdre un navire est une catastrophe économique.
Yves Gaignet , Belem, trois-mâts barque (état de 1896), © Musée national de la Marine/A.Fux
Au XIXe siècle, l’installation d’Européens s’accélère un peu partout dans le monde et les échanges commerciaux se font désormais sur une grande échelle. L’importation du thé de Chine cher aux Anglais donne lieu à la course au thé. De rapides voiliers, les clippers, rivalisent pour rapporter la précieuse cargaison. En France, les grands ports normands multiplient les échanges avec les Amériques, en particulier pour le cacao et le café d’Amérique et des Antilles. Le Havre se taille la part du lion dans le commerce du café en créant une ligne régulière de clippers partant deux fois par mois vers le Brésil : « les hirondelles de Rio ». La consommation des denrées très coûteuses au siècle précédent se répand dans la société européenne : café, thé et cacao sont désormais à la portée de tous.
Connaissement du 24 septembre 1724 pour une cargaison de café et d'indigo sur un trajet Port-au Prince - Bordeaux et composition d’échantillons de botanique, © Musée national de la Marine/A.Fux
À partir des années 1830, la France développe les échanges au sein d’un empire colonial constitué en Afrique, en Indochine et en Océanie. Marseille en bénéficie ; avec Le Havre, c’est l’un des principaux ports de commerce français. L’adoption de la propulsion à vapeur par les compagnies maritimes à la fin du XIXe et au début du XXe siècle facilite l’établissement de services de cargos à départs réguliers vers l’Indochine, Hong Kong, Shanghai. Durant l’entre-deux-guerres, les lignes d’Afrique du Nord au départ de Marseille chargent à l’aller du sucre, des engrais, du fer et des produits manufacturés et au retour les produits du sous-sol (minerais et phosphates) et de l’agriculture : primeurs, agrumes, vin, moutons. D’autre part, la France partage avec le Royaume-Uni l’administration et la desserte maritime de la côte occidentale de l’Afrique d’où proviennent du café, du cacao et de l’huile de palme ainsi que du bois en grumes. Si le cargo type est un bateau polyvalent, on construit également des navires spécialisés : vraquiers pour les céréales, pinardiers équipés de citernes apportant en France le vin rouge, le « pinard », produit en Algérie ou encore bananiers équipés d’une ventilation d’air frais.
Hugo d'ALÉSI, Marseille, port marchand, 1900 (?), © Musée national de la Marine/A.Fux
À lire : 2000 ans de commerce maritime. De l'amphore au conteneur. Agnès Mirambet-Paris et Didier Frémond, Hors-série Découvertes, Gallimard.
Agnès Mirambet-Paris